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Tout sur Jean Michel Jarre

4 mai 2024

Pari texan (juin 1986)

 

Houston, Texas – Avril 86

Je ne sais pas si c’était vraiment, comme certains de mes confrères l’ont écrit, le concert du siècle, mais force est de reconnaître que Jean-Michel Jarre, après la Chine et la place de la Concorde, a une nouvelle fois créé I’événement en réalisant un spectacle musical et visuel d’une envergure et d’une ampleur absolument stupéfiantes. Cela se passait à Houston au Texas au début du mois d’avril et la soirée s’intitulait « A city in concert » (une ville en concert). En utilisant ce titre, Jean-Michel Jarre n’exagérait en rien puisque, en toile de fond mouvante de son concert, il se servit d’une douzaine de gratte-ciel de trois cents mètres de haut qu’il faisait apparaître et disparaître, qu’il coloriait, illuminait, décorait au gré de sa musique devant plus d’un million de spectateurs médusés et séduits.

La musique de Jean-Michel Jarre, vous la connaissez, vous ne pouvez pas y avoir échappé tant elle est présente dans notre quotidien, utilisée souvent à la télévision en illustration musicale et dans tous les endroits qui requièrent un fond sonore instrumental. Ses détracteurs parlent de musak ou de musique d’ascenseurs, ses fans voient en lui le grand compositeur moderne de notre siècle. Jean-Michel Jarre est en tout cas le seul qui soit allé aussi loin avec une musique qui puise directement, sinon son inspiration. Tout au moins sa conception et sa réalisation dans les nouvelles techniques et la logique particulière de I’intelligence artificielle des ordinateurs. Est-ce suffisant pour I’accuser de froideur ?

MAESTRO

Ceux qui le font n’ont certainement jamais entendu Jarre en concert, ni vu de leurs yeux une ville entière bouillonner de plaisir et d’émerveillement enfantin comme ce fut le cas à Houston. Ce concert lui fut commande (comme autrefois les rois commandaient des messes à Mozart) par la ville de Houston qui fêtait ses 150 ans d’existence et la Nasa ses 25. (Voulez-vous entendre Ia très mauvaise plaisanterie qui circule là-bas ? Que signifie le sigle N.A.S.A. ? On s’accroche pour la réponse : Need another seven astronauts). Pourquoi lui ?

Jean-Michel Jarre : « Ils connaissaient ma musique et voulaient que cette célébration se déroule de façon différente, ils voulaient sortir des chemins classiques du spectacle. Sinon ils auraient engagé un Mickael Jackson ou une Madonna. Ma musique se prète aux grands espaces, pas le rock. Pour moi le rock est une musique de cave où l’on prend l’électricité dans le ventre, où tu viens faire ton plein d’énergie en te branchant aux murs. C’est ça que j’aime dans le rock; les Stones à l’hippodrome d’Auteuil, ça perd de sa force. J’ai presque envie de dire qu’avec la musique que je fais, c’est le contraire. Elle prend une nouvelle couleur, une autre dimension avec la distance et l’espace. C’est un concept qui m’intéresse depuis longtemps. »

Un concept qui condamne presque Jean-Michel Jarre à un anonymat visuel. En effet, sur le million de spectateurs de Houston, ils furent à peine dix mille à pouvoir effectivement voir la scène et distinguer la silhouette du maestro. Le spectacle ne prenait effectivement sa véritable ampIeur que lorsqu’il était vécu à environ à cinq cents mètres de la scène qui apparaissait alors aussi grande qu’un timbre poste. « Cela ne me dérange pas que l’on ne me voie pas, explique-t-il. Je ne suis pas sûr que l’audio visuel à domicile avec le vidéo clip soit une bonne chose. Cela décale l’enthousiasme et les fantasmes. A présent, avec les clips, tu connais visuellement un artiste avant de connaître sa musique. Avant, c’était le contraire, tu connaissais la musique et tu fantasmais sur le mec que tu avais envie d’aller voir en scène. On me reproche souvent de ne pas faire de tournées. Sincèrement, je ne me vois pas jouer chaque soir la même chose et je ne suis pas un chanteur que l’on aurait envie de voir évoluer sur une scène. Mon image est secondaire. La seule façon pour moi de faire en scène des choses créatives est de faire des choses uniques. L ‘excitation est différente pour les gens qui créent et ceux qui reçoivent. Qu’est-ce qui peut bien se passer dans la tête d’un Jean-Michel Jarre lorsqu’il se retrouve face à plus d’un million d’êtres humains ? « Je n’y pense pas, j’ai trop de trucs à régler. Je pense qu’on a plus le trac quand on joue dans un club parce que tu as le premier type à deux mètres de toi. Dans une petite salle, les regards se croisent, tu reçois des réponses individuelles alors que dans les grandes salles la réponse est globale. II avait en effet beaucoup de choses à régler sur scène. Non seulement il jouait, dirigeait I’orchestre et les choeurs mais aussi contrôlait les lasers, les feux d’artifices et les projections sur l’écran géant de 30 mètres de large sur 150 de haut collé contre un des immeubles. Pour cela il disposait d’un système complètement original de partitions sur moniteurs d’ ordinateurs. Deux partitions, une pour la musique et l’ autre pour les lumières. Le tout écrit et réglé seconde par seconde avec un véritable story-board selon la technique utilisée au cinéma. Une machine impressionnante et impossible à arrêter une fois lancée. C’est d’ailleurs ce que les techniciens durent expliquer pendant le spectacIe au capitaine des pompiers de la viIIe qui brusquement en voyant s’allumer de partout, vint ordonner que l’ on arrêta le feu d’ artifice !

TROUPE

Je voudrais vraiment insister sur un point: je ne suis pas seul dans cette aventure. Je contrôle l’opération mais je dépends complètement de mes techniciens qui sont de véritables innovateurs dans le domaine des lumières, des lasers, des projecteurs. Bizarrement, le plus dur dans ce projet fut de les garder avec moi. Les Américains ont essayé de reprendre I’affaire en cours de route et de placer leurs hommes à eux. Les syndicats sont très forts. Nous avons finalement trouvé une parade en nous faisant passés pour une troupe. Comme une troupe de théâtre ou un ballet. Quand le ballet du Bolshoï est invité à tourner aux Etats-Unis, il est bien évident que les syndicats ne vont pas s’amuser à dire. La troisième danseuse on va la remplacer par une Américaine ». C’est ce que je leur ai dit. Nous étions inséparables et indissociables. » Un des morceaux les plus émouvants du concert fut ce « Ron’s pièce », qui devait à I’origine être joué au sax par Ron McNair un des astronautes qui a trouvé la mort dans le dernier accident de Challenger. La première idée avait été que Ron intervienne en direct dans le spectacle depuis la navette qui aurait été dans l’espace, ce soir-Ià. Puis comme il n’y avait pas de mission prévue ce jour-là et que je ne suis tout de même pas immodeste au point de demander à la Nasa de lancer une navette spécialement pour mon concert, il avait été prévu que Ron enregistre son intervention lors de la dernière mission et que nous incluiions la bande dans le spectacle. Cela aurait été la première musique enregistrée dans l’espace. » Le destin en décida autrement. Jean-Michel Jarre a donc gagné un nouveau défi et se retrouve immédiatement devant un autre: celui de faire mieux, plus grand, plus beau, plus spectaculaire. II s’en défend, affirme ne pas chercher I’exploit pour I’exploit mais à créer I’événement pour la beauté intrinsèque de celui-ci. Les records ne l’intéressent pas et le concept de « toujours plus grand » est uniquement avancé et exploité pour raisons de marketing par sa maison de disques. Lui, il est musicien. II tombe amoureux de sites et compose des musiques pour les célébrer. Une conception très romantique qui lui va particulièrement bien. Pourquoi ne serait-elle pas réelle ? Pourquoi s’obstiner à le dépeindre comme un mégalomane solitaire ? Par jalousie ? C’est bien possible. Le succès est quelque chose qui est encore très suspect en France. Surtout si celui-ci s’accomplit de façon aussi éclatante à l’étranger.

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3 mai 2024

Paris TEXAS (Claviers, mai 1986)

 

Toujours en avance sur tout le monde les Américains, toujours plus démesurés, plus spectaculaires, Pendant qu’ici on n’en finit pas d’être fiers de nos quatre cent mille spectateurs à la Concorde I’an passé, eux se font un petit concert d’un million et demi de spectateurs. Pendant qu’on se réjouit de notre feu d’artifice du 26 messidor (ex.14 juillet), eux s’en paient un agrémenté de lasers de science-fiction, de fumées multicolores. Pendant qu’on chausse nos lunettes de soleil pour réussir à distinguer les images projetées sur I’écran riquiqui et mal orienté du concert de Chanteurs Sans Frontières, eux s’accrochent des écrans gigantesquement géants sur les façades de leurs buildings texans. Pendant qu’on s’esbaudit dans nos petites maisons de chez Merlin, eux s’offrent l’Enchanteur, le magicien de la musique du XXle siècle : choristes, synthés, claviers, ordinateurs par centaines; émotion, pâmoison, émerveillement à la tonne. Le 5 avril dernier, Jean-Michel Jarre, oui, oui, le nôtre,le seul, le vrai, mettait I’ Amérique à ses pieds avec le concert le plus féerique du siècle. Et nous alors, on n’a pas le droit à ses pieds ? .

2 mai 2024

Rendez-vous avec Jarre (Disc International, mai 1986)

 

Et si ce qu’on vous avait dit sur Houston était faux ?

Il s’est passé quelque chose d’énorme le 5 avril D.I.S.C. y était et pour cause, mais dans les comptes-rendus, – bienveillants au demeureant – de nos confrères, il apparaît aux acteurs du concert d’un million et demi de spectateurs, que la véritable signification a été manquée. C’est pour rétablir des vérités qui intéressent les professionnels que vous êtes, que la fine équipe a été passée à la grille des interviews. En espérant que vous comprendrez pourquoi Houston était si important pour le spectacle, pour notre hexagone, et pourquoi ce n’est pas le concert du siècle. Enfin pas du vingtième…

Jean Poncet

Jean-Michel Jarre, 37 ans, 27 millions d’albums vendus en 10 ans de carrière, a embrasé la ville de Houston, Texas, lors d’un concert record le 5 avril 1986.

1 300 000 SPECTATEURS

J.-M. Jarre était déjà détenteur du record d’affluence en un seul concert après avoir attiré 1 million de Parisiens sur la place de la Concorde, le 14 juillet 1979. Les Texans, en faisant appel à celui qui fut le premier artiste de musique synthétique à se produire en Chine populaire, lui permirent de battre ce record : ils furent 1 300000 à se presser dans les rues de Houston. L ‘événement était d’importance : on célébrait les 150 ans de la fondation de Houston et de l’indépendance du Texas, et le 25. anniversaire de la Nasa.

A FEU ET A SON

Jean-Michel Jarre et son équipe de 70 techniciens, assistés par une centaine d’ Américains, ont travaillé 8 mois pour préparer ce show, l’un des plus gigantesques jamais réalisé : rayons lasers projetant des images animées, écran géant formé par les gratte-ciel, 2 000 projecteurs fouillant le ciel, un feu d’artifice de 16000 bombes et fusées… Un spectacle total visible à 5 km de distance. Sur scène, Jean-Michel Jarre, entouré de 1 00 choristes, 7 musiciens, 45 synthétiseurs, contrôlait image et son à I’aide de 8 consoles. Le coût du show fut à I’image de sa grandeur : 5 millions de $, dont les producteurs récupéreront une partie grâce à la vidéo filmée par les 14 cameras de Bob Geraldi et déjà vendue dans plusieurs pays, et à Rendez-vous, le dernier album de J.-M. Jarre, sorti aux USA le jour même du concert.

UN DERNIER FEU D’ ARTIFICE, LES SOUVENIRS DE LA TROUPE C’EST JACQUES QUI TIRE LE BOUQUET FINAL

DIVA DURANT : Super, ça parait banal à dire, mais un rêve, c’est très beau un rêve, c’est Cendrillon, le bal était très réussi, le Prince Charmant était très charmant . .. quand est-ce qu’on recommence !

GENE CLAIR : Le concert était phénoménal, c’était un grand succès Pour moi c’était plus un événement qu’un simple show : ça sortait vraiment de I’ordinaire. II y avait tellement de choses tellement extraordinaires, c’était vraiment un événement !

DOMINIQUE PERRIER : Très beau feu d’artifice de tout, lumière, musique, et un très bon concert donné par deux cent cinquante personnes qui enfin deviennent des artistes en face du public

JEAN-LOUP DlERSTEIN : Au début je voyais mal tous ces Américains venir voir et écouter . Moi je suis un peu froid, je ne m’étonne pas facilement Mais le soir, j’ étais sur la scène et vraiment j’ en ai pris plein la tête, plein les yeux . C’était sensationnel ! Et émouvant aussi ! Les Américains, quand il y avait les photos des astronautes, c’était vraiment prenant, émouvant

DANIEL AZANCOT : Le gigantisme, le gigantisme. . le gigantisme ! II ne reste que le gigantisme et ce public fantastique Et je ne pensais pas que Jean-Michel allait recommencer, tu comprends la Concorde c’était en France, le 14 juillet. Mais un million et demi de personnes ! Et ça m’a marqué parce que je n’y croyais pas, mais ça c’est la magie de Jean-Michel. Certains voient la star. Moi j’ai tendance à voir I’homme, et I’homme est bien ! 

JACQUES ROUVEYROLIS : C’est la perfection, c’est ce qu’on a vécu sur la fin, c’est le feu d’artifice, c’est le final, j’ai vu quand même dix mille personnes se lever devant moi, j’étais à 70 mètres et quand tu vois tout le monde se lever d’un seul coup pour acclamer un show, sincèrement j’ai jamais vu ça, t’as raison de souligner que j’ai fait beaucoup de concerts, j’ai fait celui de la Concorde aussi avec Jean-Michel, mais à cette dimension-là, à cette émotion. Parce que c’est facile d’avoir un million cinq cent – mille personnes, mais les mettre tous d’accord, avoir une

presse unanime, la presse américaine, française, enfin mondiale, on en avait vraiment la larme à l’oeil, sincèrement, c’est pas souvent que ça nous arrive, c’est pour ça que ça fait plaisir d’en profiter. On a vécu vraiment une grande soirée, il y a un moment où j’ai quitté mon casque, et je me fais rarement des réflexions comme ça, mais là j’avais vraiment l’impression d’être au centre de la terre. Au moment du final, quand tous les feux d’artifice ont deboulé, je savais plus, ça doit faire la même chose quand on doit décoller pour la lune. . . parce-que le décompte qu’ils ont tous crié, c’était le décollage d’une navette, c’est pas possible autrement !

LE TVG JEAN-LOUIS DIERSTEIN : DE LA PREHISTOIRE A MIDI EN HUIT HEURES

Amenez vos vieux synthés à Jean-Loup et reprenez les le soir transformés en expandeurs MIDI. Ou, si vous êtes comme Jarre. faites-Iui faire ce qui vous passe par la tête : comme il ne se doute pas que c’est impossible, il le fera !

J’avais fait I’entretien de son matériel, mais depuis novembre j’ai vraiment fait de la fabrication pour lui, de la mise au point des appareils à de la création d’appareils qui ont servi pour Rendez-Vous et à Houston. Tous les vieux instruments qu’il a, on lui a mis en MIDI Exemple, sur un B3 ou ii y a une dizaine de contacts par touche set ou on travaillé en basse impédance, on est obligé de passer par des relais 12 contacts par note. D’autre part, on a une petite carte CPU avec un 280. On peut lui ajouter un convertisseur analogique-digital pour utiliser la molette de pitch, ou changer les programmes, etc… Après il y a eu le fameux clavier, qui était prévu au départ pour faire la vidéo et puis Jean-Michel a trouvé ça tellement chouette qu’il a décidé qu’il fallait lui donner une autre dimension que la lumière sur les touches. On a donc rajouté des contacts, et on en a fait un instrument de musique puisqu’on sortait en MIDI. En plus il m’a demandé d’animer des rampes, il y avait des faisceaux illuminés les uns après les autres quand il appuyait sur les notes. A Houston, tout était en MIDI : le clavier commandait I’Emu II, il y avait des touches assignées à certains travaux, par exemple pour chaque touche on avait assigné un feu ! Grâce à Jean-Michel, on a fait du MIDI qui va sur n’importe quoi, des vieux Jupiter 8, des Oberheim relativement anciens et pour lesquels les fabricants n’ont pas prévu d’adaptation MIDI

LE MUSEE DU SYNTHE…

La modernité de Jarre faisait supposer à plus d’un qu’on verrait sur la scène les instruments les plus récents et c’était vrai, Mais beaucoup ont été surpris d’y trouver des vieux coucous ou même des appareils dont ii est de bon ton de se moquer d’un air pénétré, Eh bien voila la liste du matériel. Et peut être y découvrirez-vous ce qu’est I’eclectisme technologique.

J,M. JARRE : Le grand clavier MIDI circulaire sur un Emu et un Fairlight La harpe laser sur deux Syntex, Un AKS, un clavier portable sur DX7 Des pads sur laser. MICHEL GEISS : Deux ARP 2600 Un Seiko DS 250 t un flanger ADA SYLVAIN DURAND : Un OB 8, un DS 250, un Emu et un Eminent Une pédale d’effet et un délai Yamaha une guitare clavier SH 105 Roland FRANCIS RIMBERT : Un JP 6, Roland un DS 250, un Eminent, un Syntex PASCAL LEBOURG : Un Eminent, un Memory Moog, un Moog Liberation, un Prophet, un Korg 2000 CLAIR BROTHERS: 84 54 sur scène (160 kW), 36 dans un parc, 3 consoles harrison 32 in 32 out.

FROM JMJ WITH LOVE

Denis Vanzetto qui travaille donc au studio ici avec moi, a servi de collaborateur d ‘Andy Scott, qui est pour moi certainement le meilleur ingénieur du son du territoire français. Et ils s’en sont bien tirés puisque Clair Brothers ont été assez snobés par la qualité du so, au point qu’ils veulent utiliser mes Compact Discs pour tester leurs enceintes ! Music land I’équipe de Francis et Frédéric m’a beaucoup aidé au niveau du matériel, de l’accès, un certain nombre de choses qui n’auraient pas pu être faites sans eux. Piermaria je me suis beaucoup servi du Syntex sur scène y compris même pour la harpe laser. C’est un synthé italien qui fait sourire certains et que je considère comme un des meilleurs synthés polyphoniques analogiques et que je mettrais devant Oberheim et devant Prophet. Denis Pariente : II s’est occupé du look des choses et Ies gens sur scène En ce qui me concerne il m’a été très utile c’est bien d’avoir une espèce de miroir pour savoir où on en est. Le travail monstrueux des attaches de presse Jacqueline Hanouna et Geneviève Salama

Propos recueillis et crucifiés par Jean Poncet, qui en profite pour donner son coup de chapeau à quelques-unes qui ont fait que le travail des autres mecs et pu aboutir : Anne Slizewicz, Cathy Roca, Caroline .Citrotte . Crochard et Danielle Feuilleret,

1 mai 2024

Houston à l’heure de Jean-Michel Jarre (La Nouvelle République, 9 avril 1986)

 

La ville de Houston, qui fête ses cent cinquante ans en même temps que la NASA ses vingt-cinq ans, a vécu samedi soir à I’heure de Jean-Michel Jarre. Un million de personnes, selon la municipalité, ont assisté au concert en plein air que le musicien français a donné dans un parc, au pied des buildings du centreville. Pendant une heure et demie, les façades de ces tours – ultra-modernes ont servi de décor, éclairées de couleurs changeantes par les projecteurs de D.C.A. Sur la scène, d’immenses enceintes répercutaient le son à plus de 5 kilomètres. Autour de Jean-Michel Jarre, sept musiciens lisaient les portées musicales sur des écrans d’ordinateurs et manipulaient 45 claviers de synthétiseurs. Les enchaînements visuels comportaient des effets de rayons laser, qui, en rythme, balayaient I’espace jusqu’aux nuages. Du sommet des buildings crépitaient de temps à autre des feux d’artifices. Pour cela; il a fallu transporter sur les toits de ces immeubles 50 kilomètres de câbles, 40 tonnes de sable, et convaincre au préalable les pompiers de Houston ainsi que les compagnies d’assurance. Sur une des tours encore en construction, un écran géant de 120 mètres de haut sur 65 de large était tendu. Au fil de la diffusion d'” Oxygène ” et” Equinoxe “, les morceaux les plus connus de Jean-Michel Jarre ont été projetés sur cet écran des diapositives célébrant I’anniversaire de Houston. Sous les applaudissements apparaissaient les symboles du Texas: cow-boys, troupeaux, puits, derricks et chemins de fer. Un dessin animé au laser faisait même courir un cheval de façade en façade.

 

Hommage à la NASA

La musique s’est adoucie lorsque la NASA a été évoquée : après les photos de I’homme sur la Lune, c’était le rappel de la récente tragédie de Challenger. Sur scène, un coeur de 120 enfants de Houston s’est ajouté à la musique électronique. Si la navette n’avait pas explosé, elle aurait dû filmer avec I’accélération du décollage, les lieux-mêmes où s’est tenu le concert samedi. Et une fois dans, I’espace, I’astronaute noir, Ron Mac Nair qui était aussi saxophoniste amateur, devait jouer la partition, préparée pour lui par Jean-Michel Jarre. Les deux hommes avalent répété cette musique par téléphone entre Houston et Croissy-sur-Seine, dans les Yvelines où habite le compositeur. Ron Mac Nair n’était plus là qu’en photo sur I’écran géant du concert et c’est un de ses amis qui a interprété le morceau de saxophone. Les synthétiseurs ont enchaîné avec « Rendez-vous », un morceau qui donne son titre au dernier disque de Jean-Michel Jarre et qui a été bissé dans le final. Le maire de Houston, Mme Kathy Whitmire, une femme de petite taille; jeune et décidée, s’était frayée un passage à travers la foule pour aller s’installer juste en bas de la scène. Devant les télévisions locales, Mme Whitmire a expliqué, ravie, que I’on ne pouvait pas savoir à I’avance ce que serait cette soirée, mais que Ie résultat était « fantastique ».

Un disque et un film

Les notables de Houston, une ville largement touchée par la baisse du prix du pétrole ne cachaient pas qu’ils étaient à la recherche d’un renouveau. lIs n’étaient pas mécontents par conséquent de cette démonstration original apportée par un Européen qui montre que, chez eux, iI n’y a pas que de la country-music et que leur univers texan n’est pas uniquement celui de Dallas. Quant à Jean-Michel Jarre qui avait donné, un concert place de la Concorde à Paris en 1979, à Pékin et Shanghai en 1981, iI s’est contenté de déclarer en descendant de scène : ” Quand on propose quelque chose de différent, on réussit “. Une centaine de techniciens français I’avaient accompagné à Houston. Tous artificiers, spécialistes du laser, créateurs d’images. appartiennent à des. P.M.E., d’une centaine d’employés maximum. M. Francis Dreyfus, le producteur de Jean-Michel , Jarre, voit dans ce type d’entreprise des ressources infinies de souplesse et d’invention. Ce n’est pas tout à fait I’avis du F.B.I. de Houston; il y a huit jours, au cours des essais, des électriciens français ont fait sauter, pendant plusieurs heures, le système électrique du building central de la police. Ce genre d’incident ne se reproduira pas, car Jean-Michel Jarre ne donnait qu’un seul concert à Houston. SeIon les premiers calculs, le coût en a été d’environ 5 millions de dollars, en partie allégé par la participation de la ville, au financement de certaines Installations. Mais c’est par la vente de disques aux Etats-Unis et par le film vidéo du concert, vendu aux chaînes de télévision mondiale que le producteur pense rentrer dans ses frais.

30 avril 2024

5 avril 1986 : Houston Texas (Disc International, 8 avril 1986)

 

ZOZE LITEUL MORNINGZ

Devant l’hôtel Méridien se dresse un énorme échafaudage recouvert de boiseries grises. Un trio de Français, arrive la veille à Houston, se dirige vers deux flics qui montent la garde devant ce qui sera la scène du concert d’ouverture du Houston Festival. « Excusez, savez-vous où se trouvent les bureaux du concert ? »

« Quel concert ! »

Le concert qui dix jours plus tard allait bloquer les autoroutes pendant six heures à cause des gens qui le regardaient, montés sur le toit de leurs voitures, I’autoradio à fond qui débitait la musique d’un français quasi inconnu du texan moyen. Ce même texan qui le lendemain tombait d’accord avec son journal du dimanche en lisant que « Jean. Michel Jarre avait redonné son me au Texas! ». Les trois petits français avaient en tout cas été mis rapidement au parfum de ce qu’ils pouvaient attendre de ces voisins de J.R. ! En moins d’une heure ils savaient que les six ordinateurs promis, les 4 CV Fairlight et les moniteurs télé n’avaient jamais atteint les méninges de ceux qui avaient dit s’en occuper. Les téléphones furent pris d’assaut : la derrière ligne droite du pari fou était entamée.

OH BOYS !

C’est l’histoire de ce show, cent pour cent français, et qui pourtant a battu les records américains sur leur propre terrain, qui va vous être racontée par les participants eux-mêmes, et parce que les records battus sont encore ce que cette aventure avait de moins fondamental : C’EST LE Prototype DU SHOW QU’lL FAUDRA FAIRE DEMAIN SI ON VEUT QUE LES CONCERTS ATTIRENT ENCORE DU MONDE. C’est pour cela que tous ses aspects, artistiques et techniques, VOUS intéressent. Et le fait qu’un million et demi de personnes réunies pour participer a ça ont offert à Houston sa nuit la plus tranquille – aucun délit – montre a quel point ça marche. Quelle que soit votre opinion sur la musique de Jean-Michel, j’aimerais vous présenter l’homme : après tout, si un politicien réunissait autant de personnes à un de ses meetings et qu’en plus il assure la sécurité dans une des villes les plus mal famées en se passant des flics, je reverrais le problème de ma carte d’électeur ! Mon plus gros problème est de choisir dans les déclarations recueillies celles qui vont vous être présentées ici pour vous faire rencontrer ces dingues magnifiques qui ont été le régal de quelqu’un qui aime depuis longtemps à rencontrer des gens d’exception. Le ton peut vous surprendre, mais pour paraphraser la formule de Dreyfus « on n’est pas mégalos puisque ça a marché », je vous rassure : on n’est pas cocoricos ni sentimentaux non plus. Pour la même raison.

LE STADE ULTIME DU SPECTACLE, DU RISQUE ET DE LA MISE EN QUESTION – LES CREDOS DE JEAN-MICHEL

Ca correspondait exactement à ce que j’avais en tête depuis un bon bout de temps et qui était de faire éclater un spectacle en utilisant I’architecture d’une ville ou d’une portion de ville. Mais tout en gardant les règles d’un spectacle. Je ne pense pas que les règles de spectacle comme les émotions sont des choses qui sont liées au progrès de même que je ne pense pas qu’on puisse créer des émotions nouvelles. Je pense qu’il y a des constantes humaines au niveau des émotions et je pense qu’il y a aussi des constantes au niveau du spectacle, au niveau de ce qu’on peut exprimer, ou de la façon dont on peut le faire en tout cas. Or depuis trente ou quarante ans il y a des tas de techniques qui ont évolué, qui sont devenues de plus en plus pointues c’est un tout petit peu dommage de ne pas les intégrer dans un spectacle qui est pratiquement à I’aube du 21è siècle, il faudrait donc pouvoir les uliliser et qu’elles servent la musique. Parce que n’oublions pas la musique : pour moi avant tout c’est un concert. C’est pas un son et lumière, ou c’est peut-être une version futuriste d’un son et lumière dans lequel c’est la musique qui est I’élément moteur. En fait I’idée du spectacle ce serait de vivre un film en 3D, et finalement la musique est le fil conducteur et le visuel permet de rentrer sa tète dans la musique, sa tête, son corps, toute son émotion, sa sensibilité, etc… C’est un concert complètement Hitech mais à I’inverse de ce qu’on a considéré depuis vingt ans comme le technopop, ou le cote Hitech dans la musique rejetait finalement tout ce qui procédait de I’émotion, de la sensibilité etc… Alors le véritable aspect neuf de Houston, c’est d’avoir utilisé une masse de techniques hyper pointues au service d’une émotion qu’on a essayé de faire passer, tous ensemble, et que le public a pris en pleine gueule. Et un public qui certainement était un des plus difficiles au monde puisqu’il était a la fois complètement blasé puisque le plus informé et en même temps assez premier degré, c’est-à-dire qu’on ne peut pas tricher : bluffer un texan c’est assez dur ! II fallait trouver une vérité pour moi c’est ça qui a marché C’est qu’on a fourni une vérité et les gens l’ont ressenti bien au-delà de l’aspect visuel. Disons qu’il y a eu un certain nombre de premières dans ce spectacle la plus fondamentale c’est le commando français qui est arrivé au pays des cow-boys et des astronautes pour faire un spectacle que les Américains n’avaient jamais vu. Je crois que depuis cinq six ans, il y a une baisse d’intérêt pour les concerts. A cause de ça, je pense qu’on est dans la même situation au niveau de la scène que le cinéma était quand la télé a commencé. D’un seul coup il a fallu que le cinéma repense ses propres structures, sa propre histoire pour survivre. Et Houston était une proposition, et je pense qu’on va en faire d’autres ensemble qui vont justement utiliser Ies techniques de pointe qui, comme par hasard, sont développées plus particulièrement en France. Parce que finalement le concept qu’on a pu développer avec toi c’est un concept qui a germé ici, l’écran géant c’est un concept spécifiquement français, des feux d’artifice synchronisés c’ est aussi quelque chose de spécifiquement français. Disons qu’on avait donc des techniques qui étaient là et il suffisait de les réunir autour d’un concept musical qui puisse être suffisamment libre pour pouvoir complètement intégrer les techniques visuelles. Et moi je ne crois pas du tout à l’illustration, je pense que le vrai impact, celui qui est universel c’est l’analogie et la métaphore et non pas l’illustration.

L ‘ARGUMENT

Ce qui m’intéresse, c’est, tout en étant honnête vis-à-vis des gens qui demandent le spectacle, qu’on puisse se servir de la commémoration du Texas et de l’anniversaire de la NASA et de la ville pour en faire autre chose. C’est ce qui m’a conduit à ces trois parties, Country Space, Urban Space, et Outer Space, je voulais essayer d’éviter le côté commémoratif et j’ai réfléchi. C’est-à-dire que finalement, ce qui fascine c’est l’idée d’un homme seul face à l’espace . C’est-à-dire que le cow-boy face aux grands espaces, l’architecte face à l’espace urbain ou le prospecteur de pétrole face à l’espace que je pourrais appeler énergétique, et puis le challenge ultime qui est l’homme face à l’espace intersidéral. II me paraissait clair qu’Oxygène était lié aux grands espaces et que des morceaux comme Souvenir de Chine (il y a plus de Fairlight, il y a plus de sons réalistes, industriels) ou même des morceaux comme Equinoxe IV qui étaient très structurés, très rythmés pouvaient coller beaucoup plus à la deuxième partie, à tout ce qui était Urban Space Rendez-vous était manifestement la troisième partie parce que j’ai conçu la musique en même temps que je réfléchissais au spectacle. Par exemple Rendez-vous II, qui est vraiment le morceau qui me tient le plus à coeur de tout le spectacle, je l’ai vraiment conçu en fonction de ce qu’on pouvait en faire visuellement, des ruptures, des accélérations, des ralentissements, pour justement l’exploiter. Et puis également le morceau de l’ Astronaute qui était un morceau complètement lié à Houston.

RON MC NAIR

L’idée, c’était donc de travailler avec Ron Mc Nair, qui était donc un joueur de sax. Pour que ce morceau puisse être joué par Ron dans la navette à l’occasion de sa prochaine mission qui aurait du être Challenger et que ce morceau joué, filmé et enregistré dans l’espace. soit reproduit reprojeté le soir du concert sur l’écran. Ce morceau tel qu’il est, est exactement le morceau qui avait été fait au départ. Avec Ron, on avait eu l’idée d’exposer le contraste entre l’infinité de l’espace (le côté extra dimension ne de l’espace était illustré par toute la partie synthé) et un homme paumé au milieu iIlustré par un saxophone absolument pas traité au niveau du son qui était complètement brut. II m’a dit que les seuls sons que tu entends, c’est les sons qui sont propres au corps, et donc j’ai eu l’idée d’utiliser tout simplement les sons du battement de coeur comme rythmique et lui m’a donné un son de battements d’un astronaute enregistrés par la NASA. Et après la tragédie de Challenger, le fait qu’il y avait des battements de coeur a évidemment pris une signification complètement différente, à la fois grave et très optimiste. C’est quelqu’un qui m’a complètement sidéré par le fait que c’était un scientifique de haut niveau, complètement excentrique comme tous les scientifiques de haut niveau, c’est pas à toi que je vais l’apprendre, et qui a mis une énergie absolument démente dans ce projet, beaucoup plus que la moyenne des gens l’aurait fait. Sa femme m’a dit d’ailleurs que c’était devenu la chose la plus importante de sa vie.

BlLAN PROVISOIRE

Le projet de Houston c’était un risque de haut niveau pour tout le monde et je suis reconnaissant vraiment à tous les gens qui ont participé à cette histoire d’avoir risqué au même niveau que moi. Mais en même temps ça a ce charme là. Le charme ultime de ce spectacle c’est de savoir qu’un commando de gens travaille pendant un an pour 90 minutes. C’est pour moi le stade ultime du spectacle, du risque et de la mise en question. Par rapport à l’aspect technique, c’est certainement le concert qui a demandé le plus de techniques différentes et toutes au service de la musique et ça c’était un aspect complètement Hitech qui a été réussi par des Français et ça c’est important.

ENVOI : A MA MAIRE !

Au cours du spectacle j’ai essayé d’établir un contact avec le public qui a bien fonctionné entre différents morceaux. Et à la fin j’ai même vu Madame le Maire avec son premier adjoint qui était là en train de danser au milieu des Hells Angels au premier rang, c’est une image que je ne suis pas prêt d’oublier. Avec sa permanente en bataille.

EST-CE QUE VOUS VOULEZ ME PRETER UNE SOMME INVRAISEMBLABLE

« LE PRODUCTEUR COMME ON LES AIME : FRANCIS DREYFUS

L’argent il fallait le trouver, et I’argent, comme on a la chance d’avoir une distribution internationale particulièrement importante, la grande idée a été – à partir du moment où je n’ai pas réussi à trouver aucun sponsor européen, les gens qui sont installés aux Etats-Unis. Mais la réponse était : on n’a pas de produits à vendre aux Etats-Unis, donc ça ne nous intéresse pas ! Donc le problème était simple, on avait la possibilité par le succès passé de Jean-Michel d’avoir une distribution mondiale fantastique , tout le problème était de persuader Ies distributeurs que j’ai à travers le monde . . « Est-ce que vous voulez me prêter une somme invraisemblable sur des revenus futurs. ” C’était un pari ! Alors notre charme français a joué et on a obéré nos futurs revenus pour les deux années à venir . Le problème c’est que ça a marché. Mais il est certain qu’on n’est pas des idéalistes non plus, qu’on sortait un disque au même moment qui s’appelait « Rendez-Vous », que trois jours avant le concert, le disque était sorti dans le monde entier. Les satellites ont balancé trois, cinq minutes de news en même temps à peu près dans le monde entier, qu’on a vu des premières pages de journaux dans au moins une quinzaine de pays: c’est un supplément de marketing qui, s’il est chiffrable, est chiffrable en millions de dollars. Le principe du vrai début américain de Jarre, c’était évidemment de présenter de la scène, les Américains ont du mal à concevoir un artiste qui ne fait pas de scène, et comme on ne voulait pas rentrer dans le trip des tournées, eh bien on a fait un million et demi de personnes, ce qui ne s’était jamais vu pour un concert musical, et puis on a eu trois networks de news, NBC, CBS et Turner, on a réussi a avoir le satellite pour toutes les chaînes américaines locales, et du jour au lendemain il est devenu un artiste MTV . On a aussi réussi à démontrer sur le vif que c’était le . crossover artist rare, c’est-à-dire « artiste tous publics », alors ii est évident que d’éviter le ghetto, le ghetto du rock, de l’avant-garde ou de la musique électronique, du jazz ou du pop, permet de faire des scores étonnants. C’est peut-être désagréable à envisager, mais il faut parler un peu comme ça, sinon on pourrait penser qu’on est des doux rêveurs, mégalomanes, je voudrais qu’on arrête un peu ce côté là, parce qu’on n’est pas ça, même si a 80 pour cent c’est le plan artistique qui est prépondérant, il y du rêve et des choses comme ça, mais faut avoir les pieds sur terre, parce qu’on a bien l’intention de suivre. Je crois aussi que tout le monde dans l’équipe savait que la production prenait des risques énormes, ce qui a été fantastique des le départ c’est qu’on a demandé à tous les gens qui ont participé de travailler à prix coûtant, et ça a été une volonté unanime de dire que si ça doit rapporter à chaque entreprise, ça sera plus tard, après le show. Je pense que tout le monde a compris que ce n’était pas une affaire commerciale, c’était une énorme aventure, on était une bande de français qui débarquait pour faire sauter les Etats-Unis. Et ce show a été diffèrent. La synchronisation de tous ces effets avec la musique et cette nouveauté sur scène avec la présence des ordinateurs qui a étonné tout le monde, cette visualisation des cues et des scores qui fait sortir du score de papa pour arriver au score d’aujourd’hui, tout ça a étonné tout le monde

RUNNING GAG

Le problème c’est que Michael Woolcock a été l’initiateur, c’était le seul contact qu’on avait. On a cru un moment qu’il représentait le Houston Festival et que le Houston Festival représentait la ville. Michael Woolcock ne représentait pas tout à fait le Houston Festival, et le Houston Festival ne représentait pas du tout la ville. Ce qui fait que finalement on s’est aperçu un mois avant le show qu’on n’avait pas d’interlocuteur .

A SUIVRE

Je crois que l’intérêt de ce genre de show est qu’on impose rien à personne. Moi j’aime à dire que le fait que j’aie à payer une place ou finalement j’entends mal, où je ne vois pas Ires bien, et où finalement on m’impose de rester une heure et demie assis sans bouger, sans fumer, je pense qu’il y a un côté contrainte par rapport au propos qui voudrait nous être présente. Je pense que c’est la forme qui n’est plus valable. On a une équipe qui est très soudée,qui a très envie de recommencer cette expérience: il est évident qu’on nous attend, au Japon, il est évident qu’il faudrait faire un concert en France, il est certain que l’Angleterre est un des objectifs, 88 nous verra certainement en Australie, et qu’on a deux projets importants aux Etats-Unis pour l’année prochaine, on a des demandes pour Vienne, le Brésil nous demande de faire quelque chose, mais il faut se concentrer sur le fait de faire des spectacles qui captivent tout le monde, pas seulement des grands spectacles pour étonner, mais être créatifs, trouver I’ endroit idéal !

RUNNING GAG

Sur le toit de l’immeuble qui appartient au FBI, on devait installer 30 lampes qui sont excessivement puissantes. A la première répette, des qu’on allume toutes Ies lampes, la puissance demandée par les lampes fait sauter toute l’installation du FBI. Alors le FBI de Houston, le FBl de la côte Est, coupé du monde en pleine guerre avec Kadhafi c’était un enfer pour eux ils téléphonent aussitôt à Washington en disant . « c’était pas possible, on ne peut pas laisser ces Français nous faire des trucs pareils, on n’a plus de communications avec le reste des Etats-Unis ni avec le reste du monde, enfin on est le FBl, faut pas rigoler avec ça » . Total grâce à la maire et au FBl Washington ils ont quand même fini par dire « Bien ils restent quand même sur le toit mais on ne peut pas leur donner la puissance nécessaire, il faut donc diminuer la quantité de lampes », ce qu’on a été oblige de faire.

Christian, c’est celui qui avait fait « Larousse » à Beaubourg. C’est un conteur inextinguible et pas seulement quand il a des budgets de plusieurs millions de dollars. C’est d’ailleurs à lui que vous devez la narration des péripéties de Rendez-Vous.

COMME C’EST LOGIQUE, CA FONCTIONNE TOUJOURS

Quand j’ai débarqué dans l’affaire, il y avait déjà des contraintes du genre ça se passe à tel endroit, la scène est à tel endroit et on est censé faire quelque chose qui ressemblera au plus grand spectacle avec des écrans, des lumières, des feux d’artifice et des faisceaux. A partir de ça qui était le désir de base, on a travaillé avec Jean-Michel sur quel était le fond de l’histoire, ce qui est arrivé à êrre la division en trois parties que l’on connait, Country Space, Urban Space et Outer Space, en fonction évidemment du fait qu’on était à Houston, que c’était l’anniversaire du Texas et l’anniversaire de la NASA. Et a partir de ça qu’est-ce que ça veut dire chacun de ces éléments. On a écrit tout ce qui concernait ces éléments. Country Space, c’est les pionniers, les chariots, la bataille d’Alamo, même la création du monde parce qu’avant que les cowboys arrivent il falait bien que le Texas existe. On a fait un certain ordre, et après on s’est dit « qu’est-ce qui va être la lumière, qu’est-ce qui va être I’image ? » Par exemple la première action de feu d’artifice est très claire là dessus c’était un pistolet qui était en rotation sur un immeuble, qui se fixait dans le sens de la hauteur, et à ce moment là, comme sortant du canon du pistolet il y avait six coups et c’était des feux d’artifice. Donc il y avait un raccord, toujours, entre les différents éléments pour que ça ait I’air d’un tout. Ce qu’il fallait absolument éviter c’est que chaque élément travaille dans son coin. C’est un peu je crois ce qui a fait la différence avec les autres shows, c’est qu’on a utilisé ces techniques d’une façon particulière. Ce qui est important, c’est que quand on fait la création d’un produit comme ça, on suive une logique complète . Les gens parfois ne voient pas que tu as suivi une logique, mais comme c’est logique, ça fonctionne toujours.

RUNNING GAG

Dans l’axe d’atterrissage de Houston International, les avions passent juste au-dessus du Skyline à une hauteur d’environ six cent mètres, c’est bas. Et les gens du contrôle aérien avaient demandé que le laser soit éteint si un avion passait. La sécurité avait donc dépêché deux personnes avec des jumelles qui devaient surveiller l’espace aérien et avoir accès à un bouton d’arrêt du laser au cas où il y aurait un avion. Tu imagines Jean-Michel en train de jouer de la Harpe Laser et tout d’un coup on éteint la Harpe et il fait « Attendez cinq minutes, un avion atterrit, on reprend dons cinq minutes » . Mais ces deux Américains étaient suffisamment motivés pour que la décision suivante ait été prise de concert avec eux à partir du moment où ils voyaient un avion, mettons dons la partie gauche du Skyline, ils tournaient rapidement la tête vers la droite en se disant qu’il n’y avait vraiment rien dons 1’espace et que avec des jumelles ils n’avaient rien pu voir de I’arrivée d’un avion…

Le fait que, par exemple le début était rouge et que ça passait au bleu, pour nous c’était la création du monde donc I’explosion du Big Bang, et puis après le refroidissement et la mer par exemple. Je suis persuadé que personne n’a su qu’on voulait faire ça mais comme pour nous c’était logique, il y a eu un fonctionnement qui fait que les gens ont participé même s’ils ne savaient pas exactement ce qu’on faisait. C’est ce qu’on a voulu faire tout le temps au cours du show.

 

 

MAIS QU’EST -CE QUE VOUS VOULEZ QUE JE FASSE DE PIANISTES ?

On peut dire qu’on peut donner une vie extraordinaire à des gens qui jouent du keyboard. On a essayé d’en donner à travers le computer Graphic, c’est-à-dire tous Ies scores sur computers qui permetlaient au niveau de I’image télévision d’avoir sur les stands des musiciens un jeu de vidéo qui était soit les scores soit les cues c’est-à-dire les informations qui disaient ce qui se passait au niveau visuel sur le Skyline, ou même au niveau musical, donc ces animations qui entouraient les musiciens permettaient au niveau de la vidéo et du film d’avoir une vie autour de chaque musicien Ce qui était pointu c’était le fait de faire travailler toutes les techniques dans une coordination qui soit une création agréable à I’oeil, astucieuse, qui va avec des rebondissements, des descentes douces, des remontées violentes, enfin de faire un film en une heure vingt. Donc d’avoir le même style de création et de rebondissements que dans un film.

RENDEZ-VOUS PREMIERE ET UNIQUE : CLAP !

Un million et demi de personnes, c’est énorme mais malgré tout, on se contentait pas de faire du record, c’est pas ça le propos. En fait, ce qui nous intéressait c’était d’en avoir une diffusion possible au niveau du monde enlier, donc à partir d’un film vidéo pour les chaines des différents pays, et c’était donc très important qu’on ait une bonne image. Si on regarde la scène, c’était carrément un studio et la vidéo était complètement repérée parce que pour des questions d’enchainements musicaux avec les visuels, les effets spéciaux, les feux d’artifice, le laser, tout fonctionnait avec un générateur de Time Code qui donnait une horloge en continu, et les équipes vidéo avaient ce Time Code dans leur car. Car le show était en fait piloté par de I’électronique, que ce soit au niveau des computers, ou de I’horloge, de façon à pouvoir avoir un déroulement au niveau des images et de la musique qui soit complètement raccord car c’était I’essenliel. Donc tout était fait avec le Time Code, les musiciens avaient une click.track dans les oreilles ils pouvaient se raccorder parfaitement avec I’ensemble

ET C’EST PAS FINI

On a pu réaliser une partie seulement de tous nos rêves et donc on a encore en réserve beaucoup de choses qu’on avait créées pour Houston qu’on n’a pas pu faire qu’on pourra incorporer dans d’autres shows, tout en améliorant en fonction des enseignements. On est persuadé qu’avec tout ce qu’on a appris et toute la recherche qu’on continue de faire, on pourra faire mieux, quelque chose de mieux fignolé, de plus créatif, de plus excitant pour les gens. L’idée de base dans ce style de spectacle c’est de recréer réellement une aventure en trois dimensions pour les spectateurs Les gens ont besoin de vivre quelque chose qui les prenne réellement, qui les emportent, ils ne veulent plus être passifs, ils veulent participer et c’est vraiment ce qu’on cherche à faire, c’est pour ça que le spectacle les englobe entierement et ils devraient avoir I’impression de le vivre eux.

LE VIEUX ROUTIER PLEIN PHARES : JACQUES ROUVEYROLLIS

C’est lui qui m’a surnommé « le prof », Un peu comme les Clair Brothers font le son de tous les concerts qui comptent, Jacques fait les lumières de tout ce qui se passe d’important sur les scènes de chez nous. Un fou pas fou et Iyrique, écoutez…

J’ai fait les lumières, avec Christian Bourret, avec Carotte, avec toute I’équipe et faut vraiment souligner que c’est bien le travail de toute une équipe française, pas d’un seul mec – Si le spectacle a fonctionné comme ça c’est déjà parce que la musique est excellente mais aussi la coordination parfaite qu’il y a eu entre tous les techniciens français, qui, jamais une seconde, n’ont perdu espoir d’arriver à ce qui s’est passé Et ça il faut le dire très très fort les techniciens français sont en train de prendre une grosse importance dans les spectacles mondiaux, je parle pas de la France, je parle international – La France a une grosse carte à jouer ils ont prouvé en tout cas qu’ils étaient à la hauteur techniquement, mais qu’ils dépassaient la technique pour une fois le spectacle commencé, devenir artistes, et ça il y en a pas beaucoup dans le monde, pas beaucoup.

FIAT GRAND LUX

C’est vrai qu’avec la musique de Jean-Michel, il y a que ce genre de lumiere, c’est-à-dire de Trooper qui peut fonctionner. Les trois quarts du matériel étaient à arc, c’est phénomenal la télévision nous demandait de diminuer un peu alors qu’en France on me demande toujours d’augmenter. Dans un concert normal, il y des structures de lumières qui délimitent un cadre de scène à I’italienne ; là, lorsqu’on s’est aperçu de I’ampleur, on s’est aperçu qu’on faisait un concert du 21è siecle, on s’est aperçu qu’on n’était plus dans les normes humaines, on n’avait plus de comparaison ! Donc je pense qu’on a eu un réflexe intelligent de ne pas mettre de cadre de scène, et de faire une scène très tres espac »e, qui allait parfaitement avec le reste des buildings et de ce qui s’ est pass » autour. Donc une conception d’espace. On a essayé de donner une lumière beaucoup moins brillante, mais diffuse, comme dans I’espace <ça a été fantastique, parce que Daniel Azancot pour moi, c’est une merveille . Il fait ses feux d’artifice comme je fais mes éclairages. J’ai pas trouvé en tout cas un technicien qui soit à côté de la plaque. Christian Bourret quand il a fait la mise en scène, était complètement dedans. Dès la première réunion il n’y a pas eu une seule fausse note, et ça s’est passé comme souvent on a rêvé bien avant.

RUNNING GAG

Répétition lumière sur la scène: quarante poursuites, des super Troopers et des Gladiators, ce qui se fait de plus puissant dans la poursuite. Et a Houston : ils ont des hélicoptères de la police équipés avec des petites poursuites – pour uoir ce que font les gens en dessous. Or quelqu’un de la police s est amené assez près de la scène, environ 150 mètres et a joué auec sa petite poursuite vers la scène. D’un seul homme, les poursuiteurs ont braqué les poursuites sur l’hélicoptère qui, complètement ébloui, affolé, a aterri en catastrophe dans le parking devant,nous. . Le pilote est sorti en Courant avec son pistolet à la main et comme il avait toujours les poursuites braquées sur lui, il s’est pris une planche qui protégeait des câbles électriques, il s’est étalé par terre. Ca a été un enfer. Il a tellement hurler qu’il a interdit de continuer la répétition. En pIus il a télephoné à ses petits camarades qui sont arrivés toutes sirènes hurlant, quatre voitures de flics, on a été obligés d’arrêter la répette !

COOL, OU LA SERENITE U.S. : C’EST CLAIR, BROTHER I

Un descendant des teutons qui s’appelle Eugène : c’est le technicien des frères Clair. Peut-être I’Américain le plus utile du show. Le flègme de Gene contraste avec notre bouillant méditerranisme : une page de vacances.

HAPPY BIRTHDAY

C’est notre vingtième anniversaire. Nous avons commencé par le Rock & Roll, et nous avons diversifié dans de nombreuses directions. Nous avons commencé avec de petits hauts-parleurs moniteurs et nous avons engagé beaucoup d’argent en recherche et en développement, et nous avons introduit le S4 il y a dix ans, qui est doucement devenu le standard industriel il semble que tout le monde compare ses produits au S4. Ces deux dernières années nous avons repris le developpement du S4, le HP a gardé le même look, mais il est techniquement réactualisé. Nous avons diminué le poids de 25 kilos, nous l’avons renforcé, et nous avons également changé de composants pour le rendre plus efficace

UN PALMARES QUI FAIT DU BRUIT !

Avant ceux-ci nous avons fait Live Aid qui a été un gros succès, nous avons fait Rock and Real qui fut aussi un succès plutôt énorme. Nous avons fait la première tournée Springsteen en Europe et aux States en exterieurs, celle des Jacksons en extérieur avant cela. Nous faisons aussi des tournées moins importantes Bruno Waher est un de nos clients suisses, Eddy Grant et Kenny Rogers, pour n’en citer que quelques-uns assez différents. Au niveau puissance, le concert d’hier était probablement équivalent à la plupart de ceux qu’on vient de rappeler, la différence est qu’on a réparti la puissance sur une plus grande surface que ce que nous faisons d’habitude Nous avions cinq sources entre la scène et les points distribués dans les parcs. Dans un stade, tout est relativement concentré, ici, sur plusieurs miles, il a fallu changer notre façon de procéder . C’est quand même le genre de chose où il est impossible de couvrir toute la zone, en particulier quand on parle d’un million de personnes, ce qui je pense a été au moins le cas

FUNNY FRENCHIES

En Europe vous avez davantage l’habitude d’avoir affaire à des langages différents, mais ici, tant que nous ne voyageons pas sur d’autres continents, nous n’avons pas ce cas de figure. lls parlaient bien anglais mais nous, nous devions écouter plus attentivement; entre Américains, on peut bredouiller des choses et on se comprend. Mais tout c’est bien passé en fin de compte. On est juste en train de dire qu’il a fallu parfois être un peu patient, mais ça fait partie du métier de faire ce qu’il y a à faire. Donc d’attendre quand ii faut attendre.

RUNNING GAG

Les répétitions étant entre 9 heures et 5 heures du matin c’est-à-dire pratiquement toute la nuit, après quelques heures de patience, les plaintes étaient si nombreuses que la police est venue et a exigé 100 dollars d’amende payables immédiatement sur la scène. Les musiciens sortent chacun 20 dollars, cinquante, Jean-Michel, les techniciens son ont payé les 100 dollars. La police est repartie et on a repris la répétition: du moment qu on avait payé l’amende tout allait bien.

Toujours un écran plus haut : Jean-Michel Quesne

Un diaporama ça n’a pas I’air révolutionnaire. Mais quand on le fait deux fois trop grand, il faut réinventer TOUTE la technique. Mais Jean.Michel a eu un mois entier pour le faire, alors…

A HOUSTON, LE PRIX DU METRE CARRE EST A DORMIR DEBOUT !

En fait, avec les techniques habituelles de projection géante on ne pouvait pas faire d’images plus grandes que 25 à 30 mètres, mais là, cela faisait 60 mètres de base et 120 mètres de haut. La dimension, cela entrainait à faire I’image plus grande que ce qu’on n’avait jamais fait, ce qui voulait dire bricoler les appareils pour augmenter la puissance, c’est-à-dire enlever des verres anticaloriques. Mais ordinairement on projette du film gélatine, or, si pour augmenter la puissance on enlève les verres qui diminuent la chaleur, le film n’est plus utilisable. Au théâtre, à I’origine, on projetait des verres peints à la main. Mais dans le spectacle en dehors du théâtre, ça n’est jamais employé comme cela : nous avons eu I’idée simplement de reprendre cette technique-là. Effectivement si on n’a que le verre et quelque chose qui tient à la chaleur dessus, on a plus de problèmes. On a donc imprimé les images en sérigraphie avec une encre, c’était une première étape. On a fait un diaporama comme on fait un 24 x 36 normal en multivision, ce qui permet d’animer I’image et de faire des effets très films d’animation, et ce que I’on sait faire en 24 x 36 normal. Donc on avait sur cet écran 8 appareils, une image dans le bas, une image dans le haut qui se recouvraient, et une image dans le centre. En haut et au centre on avait 3 appareils et dans le bas il y en avait 2. II y avait un problème de dimension de I’image : les plaiques que I’on utilisait faisaient 24 centimètres par 24 on en a fait 600 ! 40 mètres carrés. On a tramé les images pour avoir du modelé. Au niveau du film on a travaillé les images sur nos bancs de reproduction. Il y avail énormément de parallaxe en raison de la taille de I’écran : 120 mètres de hauteur situé à 50 mètres du sol. Il aurait fallu que I’axe des Pani soit à 110 mètres de haut, et la tour de projection n’était qu’a 25 mètres ! Ce spectacle a nécessité de s’installer dans un nouvel immeuble où la chaine de fabrication a tourné jour et nuit pendant 3 semaines ! On a eu trois semaines pour faire ces 600 plaques, tout compris : conception, découpage, montage, labo impression, cuisson et mise en couleur à la main. Seule I’imprimerie a été réalisée à I’extérieur En plus ça demande une précision parce qu’une fois que c’est terminé sur le verre on ne pouvait plus rien changer .

SHOW DEVANT !

Les Pani faisaient 6 kilowatts avec des lampes HMl, avec système d’amorçage, en fait il s’agit d’un arc qui se forme dans une ampoule, il n’y a pas de filament. Et c’est la suppression des anticaloriques qui a permis de doubler la base de projection. On a fabriqué des systèmes de volets programmables, des boitiers programmes par ordinateur, le problème étant que le changement de vue était manuel mais on arrivera un jour à un changement automatique. On avail un technicien par appareii qui changeait les plaques avec des gants alerté par un voyant sur le côté. Egalement, les techniciens étaient casqués pour recevoir des ordres plus précis. En plus on comptait sur un écran en plastique très Iumineux, mais Ies architectes du building ont eu peur du poids et du fait que le plastique, plus rigide, aurait pu arracher les huisseries métalliques sous la force du vent. Cela s’est vérifié puisque I’écran en toile s’est déchiré deux jours avant le concert ! II y avail un autre aspect qui était celui de la conception du spectacle, où il était nécessaire d’avoir une étroite collaboration avec toutes les autres équipes. Nous avons écouté la musique, et opéré d’après Ies directives de Christian Bourret afin d’accorder les couleurs des images avec les feux d’artifice par exemple. Ces images ont été une rupture avec nos réalisations précédentes, aussi bien au niveau du type d’image que du point de vue de la quantité, on avail 200 plaques d’habitude. Mais c’est un peu ce qu’on cherche à faire, ça va tout à fait dans le sens de ce qu’on essaye de promouvoir.

SI ON PROJETAIT SUR LA LUNE POUR AVOIR MOINS DE VENT…

Ca a confirmé I’avis qu’on avait d’aller dans le grand. On aime bien le risque. là c’ était parfait ! Les gens en ont eu marre de rester devant leur télévision, par rapport au petit écran, les gens vont se retourner vers des images plus grandes, c’est la seule issue pour le cinéma actuellement

LE POTE AUX SAPEURS : DANIEL AZANCOT

”C’est rare de trouver quelqu’un qui dans les artifices travaille d’une façon aussi artistique. La plupart du temps bien sûr ils sont branchés sur une sorte d’idée générale artistique, mais lui a vraiment dépassé ça pour trouver des concepts qui aillent avec la musique. Et en plus il y a une idée du clan, de fidélité, avec lui, qui est un aspect très important et qui moi me plait beaucoup” . J.-M. Jarre.

ON LEUR A JOUE UN TOUR INFERNAL

C’était nettement plus haut, plus grand que ce que je fais d’habitude, et la c’était intégré dans le spectacle. La vedette n’était pas le feu d’arlifice, le feu d’arlifice était un des éléments du spectacle. C’était peut-être un élément plus magique, un peu féerique, mais c’était un élément du spectacle. Et ce qu’on a voulu faire, c’était de faire des panaches de feu aux différents immeubles. Faire des arcs-en-ciel, puisque c’est le symbole de Houston, en tous genres: en monochromie d’abord, vert, rouge, jaune, avec différents produits qui montaient entre 20 et 200 mètres de haut et pour terminer en polychrome. J’ai joué sur la diversité des engins et des hauteurs. Ce qui était intéressant c’est que ça partait déjà de 325 mètres pour le plus grand immeuble. Ce que j’ai ajouté, c’est des mouvements de bombes . Les immeubles se parlaient, se répondaient, se lançaient les boules, j’ai essayé de balayer toute la Skyline en quelques fractions de secondes. Ce que les gens voient en une demi-heure sur le stade d’un grande ville de France, ça partait en 9 minutes. Au minimum il y avail 3 000 bombes ! C’est pas compliqué : on a mis trois jours et demi pour monter le matériel sur les terrasses. Les Américains n’avaient jamais vu de feux d’artifice synchrones. On le fait très couramment en France, bien sûr pas aussi important, ni aussi haut, ni aussi grandiose. A chaque fois il y avait une symphonie en bleu, en vert, puis tricolore (parce qu’il y avait le drapeau texan d’un côté et américain de I’autre – en même temps c’était le drapeau français..), donc pour chaque image, il y avait un très beau, très grand feu, mais traité différemment

RUNNING GAG

Après une heure de spectacle le Fire Marshall affolé par le dégagement de fusées dans I’espace et parce que Ies spectateurs avaient envahi la ville voulait arrêter le show. Le régisseur général, Philippe Cieutat qui lui dit que c’était impossible parce c’était tout computérisé et une fois que c’était lancé c’était inarrêtable. Et le Fire Marshall a couru partout et en s’adressant à tous les Français qui faisaient comme s’ils ne comprenaient rien. Et le feu d’artifice final qui était le plus important s’est déroulé sous ses yeux explosés. La bouche ouverte, regardant ce qu’il se passait, demandant au chef de la police d’arrêter le show. Mais c’était pas son jour et le chef de la police lui a dit : « écoute, je ne pense pas qu’on puisse arrêter le show » Il n’y a pas eu de blessés, les gens sont contents, il a qu’à laisser faire ».

Vous savez pas la meilleure : c’était un concert live !

Alors parlons des musiciens, de notre Diva et du petit génie qui faisait fonctionner tous ces engins ensemble. Avec une place particulière pour Michel Geiss, vous comprendrez vite pourquoi, et je vous jure qu’il n’y aura pas de jaloux…

MON SAINT-MICHEL : GEISS

« Je travaille avec lui depuis très longtemps et c’est certainement une des rares personnes en qui je fais une totale confiance c’est quelqu’un qui, pour moi, a des qualités tout a fait particulières qui sont des qualités d’humaniste. Quelqu’un qui est complètement éclectique dans ses choix, dans ses goûts, et qui couvre un très large horizon pas seulement de connaissances, mais d’affinités, d’aptitudes. II avait la charge de coordonner toutes les choses sur le plan musical, sur la scène, il a été à la base de ma rencontre avec toi comme celle de beaucoup d’autres dans l’équipe, Michel est un élément important de ce projet et des suivants évidemment . » JM Jarre

J’ai essayé de mettre des gens en rapport, pour la plus grande efficacité du show, je l’espère. Par exemple, j’ai présenté Arnaud de la Villesbrunne que Jean-Michel ne connaissait pas, Jean Poncet, pour ne pas le citer non plus, que j’avais rencontré lors d’une émission de télévision dans laquelle Arnaud était présent aussi.. J’ai aussi recruté les musiciens à la demande de Jean-Michel Parce que beaucoup de musiciens sont compétents, mais il fallait qu’ils soient disponibles un maximum et ceux qui étaient présents se sont dévoués un maximum. Et je crois que cette équipe s’est soudée et qu’elle est maintenant prête à recommencer . J’avais un de mes instruments préférés multiplié par deux : c’est l’ ARP 2600 (qui m’a fait rencontrer Jean-Michel alors que j’en faisais des démonstrations) , il permet de sculpter des sons avec beaucoup de possibilités, et il donne des résultats sonores très différents des samplers et autres machines d’aujourd’hui. II y avait aussi un Seiko DS250 que les gens ne connaissent pas parce qu’il n’est même pas importé en France et que nous avons eu directement par le Japon, mais il se trouve qu’il a des sons assez proches de ceux du PPG pour un prix très très inférieur. II a été utilise dans le disque . Rendez-Vous plusieurs fois.

LE MUSICIEN QUI NE FAIT PAS LE DETAIL: FRANCIS RIMBERT

Le premier truc qui m’avait étonné c’était le côté complètement fou, c’était pas clair du tout celle histoire-là, c’est-à-dire qu’ils devaient m’expliquer ce qu’on allait faire et la première rois que je l’ai vu je n’ai rien compris de ce qu’on allait faire et quand on a terminé le concert j’avais toujours pas compris ce qu’on venait de faire. D’abord ça n’a aucun rapport avec tous les autres concerts que j’ai pu faire déjà parce que ce qui était curieux c’est que Jean-Michel voulait absolument avoir le son du disque. Et c’est ce qui était marrant : de travailler avec de grosses machines assez sophistiquées des sons qui avaient été faits sur des machines non sophistiquées. Refaire des sons analogiques avec des digitaux c’est rigolo. Ce qui avait d’amusant c’était quand même l’orchestration puisque la grande idée c’était de faire jouer par exemple, des cordes et plusieurs parties d’Eminent par exemple des cordes alors que d’habitude avec des synthés on fait pas ça, on fait une partie de cordes et puis on la double et puis ça s’arrête là.

DES SCORES A SA PORTEE : PASCAL LEBOURG

Je me suis enfermé un mois dans le studio de Jean-Michel avec mes collègues, nous avons travaillé sur tout ce qui était partitions, très important, nous avons travaillé particulièrement avec Sylvain, et Leo Clarens qui a copié toute la musique qu’on a rentré après dans vos ordinateurs qui ont, remarquons-le, très bien marché le jour du concert Puis la rencontre avec de nouveaux musiciens, une entente formidable, Jean-Michel Jarre un type extra c’est pas souvent qu’on tombe sur des artistes aussi sympa. Je crois que c’est la première fois que je travaille avec une équipe avec laquelle je m’entends à la perfection Le gag mémorable! J’étais en train de jouer, j’écoute un accord complètement dissonant qui restait bloqué sur mon clavier. Je l’éteins, je rallume en prenant soin de tout remettre à zéro, en affichant ies registres après, mais en définitive je me suis aperçu que ce n’était pas un plantage MIDI, mais c’était les feux d’artifices qui tombaient du ciel et dont un débris était tombé entre ies touches, ce qui faisait que le clavier du haut de I’Eminent était inutilisable complètement. Ca fait un souvenir.

UN CALME FOU : DOMINIQUE PERRIER

Ancien de la Chine. J’ai Jean-Michel Jarre dans les pattes depuis un bout de temps, on a fait les disques de Christophe ensemble, il a fait le premier spectacle de Christophe à I’Olympia avec un piano qui volait, il a fait le premier spectacle à I’Olympia qui a étourdi le public parisien . Il commençait à sévir. Dreyfus était dans le coup, il était producteur Dreyfus lui, il s’occupe de I’artiste, il suit la carrière intégrale de I’artiste, c’est très très rare, je crois que c’est le seul.

Houston ? Surtout une ambiance différente de d’habitude parce qu’enfin on a réussi à répéter avec d’autres musiciens qui jouent du synthétiseur, on a réussi à faire un peu de synthé à trois ou quatre personnes, alors que d’habitude on est seul dans un studio à faire du synthé tout seul, le petit génie avec son synthé qui va tout nous faire, magique ! Alors que là on était 5 synthés avec chacun son petit placard et c’était très intéressant. On a réussi à se cerner les uns les autres et à se compléter . Ca me rappelle un peu mon enfance. Ca me parait plus naturel de jouer devant un million et demi de personnes. II y avait un côté naturel ! Feu d’artifice, tout ça, ça me parait complètement mégalo, mais en fait c’était très sympa. Le public était très bon : c’était un million de bon public. Vaut mieux jouer devant un million de bon public que devant cent abrutis qui comprennent pas pourquoi ils sont là.

RUNNING GAG

MERCI DOMI

Alors le souvenir que j’ai, c’est que quand on a parlé des partitions sur ordinateurs, je me suis dépêché de me faire des petits anti-sèches parce que je n’y ai pas tellement cru :ça va marcher. Si tu veux pour moi c’était un souci de plus parce qu’il faut déjà savoir qui va jouer quoi, alors si en plus il y a un écran…

Et à un moment j’ai un trou de mémoire et c’était vraiment synchro, j’ai tout suivi, j’avais la partition, donc j’avais brassé pour rien.

Et dans ma tête les écrans pouvaient pas dire la même chose que la partition, c’était impossible, mais finalement ça a été carrément « la chose » donc ça c’était complètement réussi, j’étais complètement épaté.

MEET OUR CHRISTlNE « DIVA » DURAND

Un jour Michei Geiss a debarqué à la maison, a emporté une cassette de moi et mon press book et de fil en aiguille je me suis retrouvée à Houston J’ai chanté dans le disque « Rendez-Vous » mais je suis surtout classique Jarre c’était moins de changement que ce que je pensais, des techniques de travail complètement différentes, mais quelque chose de très intéressant, des gens très intéressants, très amusants aussi

SYLVAIN DURAND, PRIX D’HARMONIE, CONTREPOINT , SOLFEGE, PIANO : IL EST RESTE TRES SIMPLE

En tant que musicien classique, il y a du travail mais il y a quelques problèmes, il y a trop de pianistes. En variété, le musicien classique peut être très utile. Souvent on a besoin de gens qui connaissent toute la musique à fond, toute l’écriture, toute l’orthographe de la musique, et ça aide beaucoup à gagner du temps, pour faire des partitions, des transcriptions, aider à l’harmonie, trouver des combines, apporter quelque chose justement que quelqu’un qui n’aurait pas cette expérience aurait du mal à faire.

Houston ? Une expérience extraordinaire, et dans ce que j’ai eu à faire ça rejoint justement ce que je disais tout à l’heure, c’est-à-dire que j’ai eu à faire la liaison entre Jean-Michel et les parties de choeurs à écrire, à composer d’après ce qu’il sentait, ce qu’il voulait, à lui montrer, et une fois que ça lui plaisait, j’ai fait des maquettes au synthétiseur , et après je l’ai montré au chef de choeur qui se trouvait à Houston, avec qui encore j’ai eu à travailler, c’était un travail assez spécial de voir comment ça se passait aux répétitions, et comment ils travaillaient, etc. C’est assez original de se retrouver avec un orchestre de synthés et ça marche très très bien, ça sonne très très bien, parce que chacun a sa façon de jouer, chacun a ses trucs dont il a l’habitude, et ce qui fait que le tout s’organise bien, sonne bien à l’arrivée. Au début je pensais vraiment avoir un trac fou, monstrueux, et puis absolument pas: déjà la sécurité dans laquelle on jouait, tout était bien prêt, on avait bien organisé le travail, ça créait une atmosphère qui nous mettait à l’aise et nous laissait nous occuper de notre look – sur scène, de bien « looker » c’est important – non vraiment de ce côté-là, content de jouer, aucune appréhension, pas de trac du tout. Toutes les parties qui avaient été faites avec beaucoup de difficultés en studio avec montage, tout était sur bande, mais tout ce qui était jouable était joué à cent pour cent.

COURS DU SOIR

On a fait des choses que les Américains ne connaissaient pas parce qu'il s’en tire plein des feux la-bas Mais il fallait trouver le truc qui les étonne, et je crois qu’on les a étonnés parce qu’ils ont découvert quelque chose, ils ont vu de la pyrotechnie autrement Nous avons travaillé avec des artificiers houstoniens, et je suis sur que maintenant ils vont faire des feux comme nous Un artificier de Houston m’a dit . nous on fait de I’artillerie, toi tu fais de I’artistique !

LE PROF PAR DISC

A force de faire n’importe quoi on se fabrique des pièges. Puisqu’on n’est jamais aussi bien desservi que par soi-même, I’interviewer m’a assomé de questions techniques. Alors on parlera de création artistique après le show de la rentrée…

Jean Poncet, comme les autres tu as été recruté par Michel Geiss qui connaissait tes antécédents en informatique musicale, en mise en scène et en audiovisuel ?

Oui.

Il t’a donc proposé de rencontrer Jarre pour définir l’incorporation de l’informatique centrale du spectacle et sa partie plus proprement visuelle. Et en fait vous vous êtes orienté vers une vision à moyen terme ou l’ordinateur deviendrait un contrôle de processus pour la gestion d’un spectacle en temps réel. Ce qui a nécessité une étude de configuration assez exceptionnelle ?

Tout a fait. .

Et tu as résolu cela en installant un compatible IBM AT assez musclé, je crois, co-processeur, 9 mega de mémoire sauvegardée, disques durs de 90 méga, le tout dans un chassis avec 20 slots et des cartes d’entrée/sortie contrôlées par 68000 pour avoir d’énormes capacités de transfert. Il a fallu aller chercher les éléments aux States et c’est Informatique Française qui a assuré la configuration de ce bricolage.

Très juste.

Ton système est donc capable de gérer un grand nombre d’appareils du moment qu’ils ont une interface informatique, MIDI ou SMPTE. Apparemment, pour Houston tu n’as eu que le temps d’installer des processeurs vidéo et des ordinateurs pour afficher les partitions des musiciens.

Oui, des CVI Fairlight pour les premiers (merci Los Angeles) et des IBM PC pour les seconds (merci Computerland) ! .

Tu dis merci parce que tu t’es fait sponsoriser, n’est-ce pas !

!!

J’ai meme appris que Computerland offre de fournir la logistique de tous les prochains concerts. Ce qui promet, eu egard à I’efficacité dont ils ont fait preuve.

Les nouveIles vont vite.

Alors vous avez rentré tous les musiques de Jean-Michel dans des séquenceurs personnal Composer de Jim Miller, vous les avez imprimées sur une imprimante rapide Dataproducts et vous avez fait défiler les partitions devant chaque musicien pendant le concert. Ils m’ont dit que ça leur avait été utile, d’ailleurs. D’autre part, pour la vidéo, tu as réalisé un interpréteur de commandes et un programme de contrôles pour les CVI qui a permis d’animer des images pendant une heure et demie sur les écrans TV qui étaient aussi à côté des musidens. Qu’est-ce que tu affichais là-dessus ?

Les cues.

C’est-à-dire les repères du déroulement du spectacle les départs de feux d’artifice, etc. pour que les musiciens et Jean-Michel puissent suivre facilement le déroulement des opérations. Et vu ta tronche, tu as travaillé jour et nuit depuis novembre. Mais tu n’étais pas seul. Il ne faudrait pas oublier Loic de Mantaignac, Dino Lumbroso et Dominique Boucher qui ont édité les partitions relevées par Leo Clarens et jouées par Didier Egea, Pascal Lebourg et Sylvain Durand. Non plus Daniel Sultan qui a fait les handlers de ton système loufoque. Et en plus que tu as recruté sur place BrIan James et Fiona Commins qui t’ont fait tes éditions et ton secrétariat…

Je pourrais en placer une ?

Je sais, tu vas me dire qu’ils ont un peu travaillé pour tout le monde… Enfin je suppose qu’au milieu de tout ça tu travaillais de temps en temps ? Mais puisque tu avais du temps de libre pendant que tes esclaves se tuaient à la tâche, qu’est-ce que tu as ramené comme souvenir de Houston ?

La vision des hordes du public qui traversaient les rues transversales à perte de vue à la fin du concert.

Ah oui, parce que tu figurais sur scène pendant que les autres souffraient dans l’ombre. Et bien sûr tout a bien marché et tu prépares déjà les étapes pour le prochain événement. Tes configurations semblent vraiment assez puissantes pour tenir le choc : j’ai chronométré un rapport de vitesse de plus de 60 entre tes bricolos et un PC standard sur un traitement de texte. Les prix sont pas mal non plus : j’ai rencontré un copain qui a essayé de faire le même genre de choses dans un projet telecom et à qui c’était revenu deux fois et demi plus cher.

Merci.

Enfin, y-a-t.il quelque chose que tu voudrais ajouter ?

J’ai jamais vu un interviewer pareil ! (Propos recueillis sur une fin de cassette le 8 avril 86.)

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29 avril 2024

Jarre in Houston : un ave pour la navette (5 avril 1986)

 

D’ “Oxygène” à « Rendez-vous », quoi de plus logique pour cette fusée du « planant » que sa rencontre avec la NASA ? C’est « Let the Midnight Spatial » au Texas.

Il y a les moteurs speedés à la nitro, lui c’est la musique Motors Oxygène. Son papa. international fait des B.O. depuis des lustres, c’est Maurice; lui, Jean-Michel, après avoir longtemps été ce qu’on sait trop peu – « parolier ». de Christophe et non du moindre ( Les Mots Bleus, Senorita…) est devenu un musicien hors-classe: spécialité techno-planant. Sorti de la cuisse de Tangerine Dream et entré dans 1a galaxie Klaus Schultze par le cortex à l’aube du punk. il a rejoint symboliquement son père en crevant les charts d’entrée avec le ballon d’essai gonflé au gaz inflammable et dilatateur Oxygène en 76. Sans tapage, il s’est alors installé tout en haut des fréquentations publiques, servi par un look « nouveau philosophe » cheveu mi-long mais propre (entre Gonzagues St-Bris, J.J. Goldman et B.H.L.) et par l’image de couple « à part» que sa célèbre épouse. Charlotte Rampling. et lui créaient, mystérieusement (popote ? ou Portier de nuit ?). Développant toujours plus subtilement sa stratégie internationaliste électronique, ce maitre-planeur à 1a vie rangée a depuis, mené. sa carrière impeccablement, selon un plan efficace ponctue de « rendez-vous cosmiques». En 1982, c’était sur la lancée d’une demi-douzaine d’années de succès confortable aux claviers, le prestigieux Voyage en Chine. Une cour de mass-media-men invités dans ses bagages, le souffleur d’oxygène du rock français offrait au monde, comme un bouquet les échos de son triomphe devant les foules d’enfants de Mao ( 100 unités) médusées à Pékin.

En 1984, c’était le télescopage programmé avec la connexion « repetitive-loft » Laurie Anderson; Peter Gabriel :Zoolook; et son quadrillage proto-logiciel de la planète linguistique : Einstein on the beach polyglote-pop. Anecdote relative à cet album : impressionné par le clip réalisé d’après La Fille aux bas nylon de Julien Clerc par le cinéaste Genet, Jean-Michel Jarre le contacta. Ainsi eut lieu, via le co-réalisateur du Bunker de la dernière rafale, la rencontre déconcertante de Jarre et Caro, graphiste à cerveau-ordinateur, emblème d’une certaine culture destroy-new wave et d’ailleurs bruiteur-musicien lui-même au sein du groupe de « zorglonde-rock » Parazite. Et voici l’heure du coup de théâtre 86, qui n’est pas rien… Un décor, ambitieusement excentré et télescopique : Houston, Texas: un public, jornalistique abondant comme il se doit et transporté gracieusement par voie d’air, jusque sur les lieux et un prétexte musical rendu dramatique par une actualité brulante: samedi soir, en effet, Jean-Michel Jarre, qui fête là ses dix ans de carrière atmosphérique, conjointement aux vingt-cinq ans de la NASA et au cent-cinquantenaire de la ville de Houston. interprète une pièce de six minutes pour saxophone et synthétiseur composée par Ron McNair. Qui est McNair? L’un des six astronautes de Challenger, la fameuse navette récemment décapsulée en direct, évidemment carbonisé spectaculairement lui-même en cette occasion. L ‘intéressant ici, n’est pas que Jarre joue feu McNair. mais que le morceau concerne, Ron’s Piece -extrait de Last Rende-Vous, ait été. selon des notes de pochette signées Jean-Michel Jarre, écrit par l’Américain dans la perspective de la première mondiale suivante: l’interprétation du morceau en apesanteur, le 28 janvier 1986, par le compositeur lui-même qui serait du coup devenu le premier saxophoniste spatial de l’histoire. La mythologie est donc au rendez-vous. Ce soir, potentialisée par le décès orbital, cette pièce initialement mineure, servie par 70 techniciens français, 120 opérateurs américains, une scène de verre de 300 mètres de haut, des stroboscopes-shows pharamineux sur forêt de buildings (2 000 projos de I 000 K W) un feu d’artifice géant synchrone, des batteries de projecteurs de DCA mobilisées à travers tout Houston pour l’occasion et Jean-Michel Jarre soi-même au pupitre sera devenue le clou indiscutable de cette fête-Iaser : Le rayon de la mort.

28 avril 2024

Jean-Michel Jarre a stupéfié les Texans (6 avril 1986)

 

 

L’hélicoptère fait du sur-place au dessus de Sam Houston Park. Le bruit de ses rotors est très largement couvert par la puissance des accords synthétiques de Jean-Michel Jarre. A l’intérieur de l’appareil, le capitaine de police W.H. Gaines, de la section des opérations spéciles à Houston n’en croit pas ses yeux : l’Inter State Freeway, l’autoroute inter-Etats qui traverse le Texas et Houston à deux kilomètres du centre ville, est totalement obstruée. Sur des kilomètres, les automobilistes ont stoppé leurs véhicules. Grimpés sur le toit des voitures, ils semblent fascinés par le spectacle féérique qui transforme la muraille de gratte-ciel du centre de Houston en un décor ahurissant de couleurs, de lumières et de feux d’artifice. Portée par des enceintes de cent cinquante kilowatts et relayée par quatre tours réparties dans le parc dégageant vingt-cinq kilowatts chacune, la musique de Jean-Michel Jarre couvre le centre de la ville et la campagne environnante sur plus de cinq kilomètres à la ronde. Du haut du ciel, le capitaine Gaines tente de dénombrer la foule immobile est attentive. “Un peu plus d’un million de personnes”, pense-t-il en constatant que la marée humaine s’étend plus loin que les yeux ne peuvent voir. “C’est la chose la plus incroyable que j’aie jamais vue”, dira-t-il plus tard. “Pendant deux heures, nous avons installé une pagaille à la française en plein Texas”, dit Jean-Michel Jarre en riant. Dans tout le parc de Sam Houston, sur les bretelles d’autoroute et dans la plaine de Buffalo Bayou, la foule s’installe depuis le milieu de l’après-midi. Les plus fanas ont fait la queue la veille, trois heures d’affilée, dans Folley’s, le grand magasin de la ville, pour faire dédicacer par Jean-Michel Jarre son dernier album “Rendez-Vous”. “Le gag le plus drôle, raconte Jean-Michel, qui a installé la scène, ses quarante-cinq claviers de synthétiseur, ses sept musiciens et ses choeurs au pied de l’hôtel Meridien on le doit à un flic américain, magnifique, dans son uniforme bleu marine, colts sur les hanches et étoile d’argent sur la poitrine qui est venu nous réclamer cent dollars d’amende à payer cash pour tapage nocturne

On a tous fouillé nos poches pour réunir la somme exigée, ensuite, on a pu continuer” Rigueur américaine contre système D à la française. Jean-Michel Jarre et Francis Dreyfus, son producteur, ont arbitré pendant neuf mois cette partie de ping-pong peu banale menée sur tous les fronts à la fois technique, artistique, politique, administratif et même psychologique, jusqu’ à cette soirée de féerie où, sur les toits des buildings, les équipes de la pyrotechnie s’activent sous les yeux affolés des ” fire-marshall ” (chef des pompiers) ” Ces vingt Français, maîtres pour un soir de l’ enchantement texan n’avaient jamais encore mis les pieds aux Etats-Unis, dit Jean-Michel Jarre Pour répondre aux inquiétudes des pompiers de la ville, ils n’ avaient appris que deux mots d’anglais ” No problem ” Au poste de commandement des lumières, Jacques Rouveyrollis s’active Pour la première fois de sa vie, le chef éclairagiste le plus génial de France a entre les mains une somme de matériel jamais réunie jusque-là trente-deux faisceaux lasers répartis sur les toits des immeubles, huit projecteurs de DCA qui colorent les façades et quarante projecteurs de scène qui obéissent tous à une rigoureuse chorégraphie dictée par ordinateur. Même de mémoire de Nasa, on n’ avait encore jamais vu ça. Et puis, iI y aussi les rayons lasers qui tracent sur les murs des dessins animés et la projection la plus grande jamais réalisée, sur un écran de cent cinquante mètres de haut et quatre-vingts de large.” Pour une dizaine de PME françaises, c’était le challenge de leur vie » , explique Francis Dreyfus. Le grand moment d’ émotion de la soirée est né du son pointu d'un saxophone, pendant que sur I’écran se dessinait l’image de Ron Mac Nair, le cosmonaute noir disparu avec son saxo dans le nuage sinistre de Challenger en janvier dernier. ” Nous devions faire un duo en direct de I’espace, Ron s’entrainait comme un fou malgré sa préparation à la Nasa, le soir au fond de son garage pour ne pas réveiller ses enfants “. Ce soir, I’ombre repliée d’un musicien solitaire se détache en fond de lumière sur la façade du Meridien et le sax orphelin pleure sous le ciel texan. Mais c’est dans le délire le plus total que s’ achève le spectacle. La marée humaine reflue alors vers la scène comme attirée par le magicien en blanc qui commande aux synthés et aux lasers cette symphonie spatiale. Dans le mouvement de la vague, Mme le maire de Houston, Kathy Whitmire se retrouve propulsée aux bords des barrières, tailleur B C B G en bataille, mis en plis hollywoodienne à la dérive, battant des mains comme une groupie, portée en même temps que sa ville par une passion frenchie jamais encore connue au Texas la “Jarremanie” aiguë.

27 avril 2024

Jean-Michel Jarre et Charlotte Rampling visitent la NASA (Télé 7 jours, 1 avril 1986)

 

Pour bien fêter ses dix ans de carrière, l’un des musicien français les plus connus dans le monde nous donne rendez-vous le 5 avril à Houston pour célébrer; avec un fabuleux spectacle, le 150è anniversaire de cette ville, de l’Etat du Texas et le 25è anniversaire du centre spatial. Nous l’avons suivi dans ses préparations.

Ce devait être une célébration de joie mais, aujourd’hui, la musique de Jean-Michel prend la dimension d’un grand requiem. Des ombres traversent le regard d’eau vive de Charlotte Rampling. Souvenirs de visages croisés ou rencontrés là-bas, à Houston, lors de leur dernière visite à la N.A.S.A. C’était I’été dernier… Après le spectacle de la Concorde à Paris- un million de spectateurs, record d’audience inscrit au livre des records – et ceux de Pékin-Shanghai, la ville de Houston a demandé à Jean-Michel Jarre la réalisation d’un spectacle pour le 150e anniversaire de la ville et de l’Etat du Texas et le 25è anniversaire de la N.A.S.A.. Là-bas, il avait rencontré les astronautes de la navette, et, surtout, I’un d’entre eux, Ron Mac Nair. .. » Bruce Mac Candless II, Explique-t-il, le premier astronaute qui ait chevauché le scooter de I’espace et qui a beaucoup contribué à l’élaboration de mon spectacle m’avait suggéré de réaliser une première mondiale : I’interprétation et I’enregistrement d’une séquence musicale dans I’espace. II m’avait proposé de rencontrer Ron qui, pour son plaisir, jouait dans un groupe de jazz. Ron était un personnage fantastique. Ron s’est passionné pour le projet. II m’a avoué qu’il avait toujours eu envie de jouer de la trompette en vol… On s’est mis d’accord sur ce que la musique devait exprimer de sensations à un homme tout seul dans I’espace Avec lui, j’ai écrit un morceau de six minutes, saxo et synthétiseur. Pour lui, ce morceau, disait-il, c’était un défi. II me téléphonait à toute heure du jour et surtout de la nuit, vu le décalage horaire entre les Etats-Unis et la France pour me faire écouter ce qu’il avait fait… Avec I’accident de la navette, j’ai perdu un ami. La femme de Ron a demandé que le morceau de son mari ne soit pas retiré du spectacle. II sera interprété par un autre saxophoniste. Je ne pourrai entendre ce morceau sans être totalement bouleversé. ” Toute la famille Jarre Rampling sera là-bas à Houston, pour assisté à I’unique spectacle d’une heure et demie. Le film du show sera diffusé intégralement, ou par extraits, quelque temps plus tard à la télévision. Une famille doublement émue puisqu’au programme figurera également Ia première interprétation clavier du plus jeune de leurs enfants, David, 8 ans. II est venu enregistrer sa partie comme un professionnel “, dit en souriant, pas peu fier, le papa. II a demandé si nous étions tous prêts, parce que lui, il avait des devoirs à faire… Maintenant, Barnabé et Emilie, les ainés veulent aussi que j’écrive quelque chose pour eux… II le fera, c’est promis, si les prochains spectacles prévus, New York, Paris, Lyon, etc, lui en laissent le loisir ” C’est vrai que j’ai trouvé là, dans cette rencontre entre I’image et la musique une forme d’expression qui me correspond très profondément. J’ai toujours ” vu la musique ” Ce que je fais, c’est I’inverse de I’illustration ou du film musical : j’écris une musique et je mets les sons en image. Et comme j’aime voyager et que je pense qu’on ne connait bien un pays et ses habitants qu’en y travaillant… Je marche sur les traces de Tintin : Tintin en Chine, Tintin sur la Lune, “

Tintin-Jean-Michel au Texas a, en tout cas, ouvert grand les yeux, ” A Houston, on retrouve tous les personnages de la légende américaine : le cowboy, le roi du pétrole, le bâtisseur et I’astronaute, Des surhommes qui fascinent le monde entier, Et. à côté de cela, des hommes tout court ” Ce qui est curieux à Houston, c’est ce décalage. D’un côté, une ville à la technologie parmi les plus avancées du monde, de I’autre une petite ville plutôt province. Ca ressemble à ” Dallas ” ou ” “Dynastie “. Avec, tout à côté, la ville, la base de la N.A.s.A. ou vivent des hommes qui appartiennent déjà à un autre monde… Des hommes tout de même. C’est triste… II a fallu cet accident tragique pour que I’on se souvienne que ces hommes n ‘étaient ni des robots ni des fonctionnaires. C’est à eux que le spectacle de Michel sera dédié. Deux cents personnes, ” une équipe à 100 % française “, précise Jean-Michel et qui ont travaillé ensemble pendant un an pour créer un gigantesque show de lumières – 2000 projecteurs – de pyrotechnie, de projections d’images de 80 mètres sur les buildings de Down Town Houston, d’effets laser projetant des dessins animés ou soulignant les lignes fortes de I’architecture de la ville. Toute une énorme artillerie d’effets visuels, projecteurs type D.C.A, éclairant le ciel, réglée comme une partie musicale par ordinateur , ” un dispositif presqu’aussi impressionnant que celui du Mission Control Center, la salle des commandes qui dirige tous les mouvements des navettes “, sourit Jean-Michel, seul maître à bord de cette aventure nommée ” Rendez-vous à Houston », comme les 33 tours qui sortira en même temps, Ce soir-Ià, il sera chef d’orchestre et metteur en scène… : ” Je ne suis pas tenté par la mise en scène de cinéma, ni par la musique de film parce que le musicien intervient toujours en fin de parcours. Mais si I’experience m’etait offerte de faire un film où la musique et I’image soient pensées ensemble, dès la conception, je n’hésiterais pas. ” Qui sait, après Tintin Jarre à Paris, en Chine, à Houston, à New York, peut-être verrons-nous un jour Jean-Michel-Tintin à Hollywood…

Martine BOURRILLON

26 avril 2024

Jean-Michel Jarre : toujours plus (Le Point, 31 mars 1986)

 

Houston (Texas) fête ses cent cinquante ans ; la Nasa, ses vingt-cinq. La première veut célébrer l’événement avec la démesure et le gigantisme qui caractérisent si bien le Texas, où rien n’est petit; la seconde, dont tous les membres passent les uns après les autres (et en direct sur une des chaînes du câble) devant une commission d’enquête. aimerait raviver son image de marque bien ternie depuis l’accident de Challenger. Pour ce faire, elles vont donc présenter ensemble le plus grand spectacle musique et laser jamais organisé au monde. Musicien choisi, le Français Jean-Michel Jarre, connu pour sa musique souvent qualifiée de « spatiale » (ça tombe bien) et ses méga-concerts (gratuits) en Chine et place de la Concorde. « Ce que les officiels désiraient explique-t-il, c’était faire quelque chose de différent. Sinon, ils auraient demandé à Michael Jackson ou à Madonna de venir. » Peu enthousiaste au début ( « Pour moi. le Texas. c’était les westerns et les barbecues de travers de porc ), Jarre se rendit à Houston et y découvrit une architecture futuriste d’une étonnante beauté. Soixante-dix techniciens français, assistés de cent vingt opérateurs américains, ont donc construit une gigantesque scène de 800 mètres de large devant les gratte-ciel de la ville qui deviendront de véritables acteurs de ce spectacle son et lumière, puisqu’ils recevront des projections géantes de 150 mètres de haut. Des rayons laser extrêmement affûtés souligneront les lignes fortes de l’architecture moderne de la ville. Et, sur les toits des immeubles, des batteries de projecteurs type DCA prolongeront très haut dans le ciel les lumières du spectacle. Voilà qui devrait faire plaisir au maire de la ville, Mme Kathy Whitmire, qui se déclarait le mois dernier en manque « d’un événement artistique exceptionnel dont on parlerait dans (out le pays ». . Gageons qu’on parlera d’un concert qui coûtera une petite dizaine de millions de dollars! Les organisateurs n’ont même aucune idée du nombre de spectateurs qui viendront y assister, l’AlIen Parkway, où il se déroulera, pouvant contenir plusieurs millions de personnes. Au cours de ce spectacle intitulé «Rendez-vous in Houston : a City in Concert ), Jean-Michel Jarre jouera l’intégralité de son nouvel album « Rendez-vous ». Les Américains entendront avec une certaine émotion un passage de six minutes pour saxophone et synthétiseur composé par l’astronaute Ron McNair, disparu lors de l’explosion de Challenger. « Ron et moi étions copains, dit Jean-Michel Jarre. Nous travaillions ensemble sur ce projet quand la tragédie est survenue. J’ai été choqué d un point indicible. » Vers quel événement planétaire Jean-Michel Jarre, qui à chacun de ses concerts (un tous les cinq ans) semble vouloir faire plus grand, va-t-il ensuite se diriger ? « Ce n’est pas comme cela que je raisonne. Je ne veux pas faire de tournée. Je n’aime pas l’idée de jouer chaque soir la même musique. J’aime créer un événement unique. Le reste : où, combien de spectateurs, les records d’affluence… cela ne me concerne pas. » Force est tout de même de reconnaître que Jean-Michel Jarre réussit à chaque fois un autre exploit: celui de s’imposer dans des pays connus pour pratiquer un protectionnisme artistique qui frise l’impérialisme ! . SACHA REINS

25 avril 2024

Des silences qui ont déplu au fisc (Libération, 3 mars 1986)

Jean Michel Jarre est un habitué des caves capitonnées où il mitonne ses oeuvres, technologiquement impérissables, d’Oxygène à Zoolook. C’est un autre genre de réduit qu’il risque de connaître le 21 mars prochain si la 6ème chambre du tribunal correctionnel de Versailles suit le réquisitoire prononcé par le procureur vendredi dernier : cinq ans de prison (la peine maximale encourue). “Eventuellement assortie de sursis”, a tout de même recommandé le procureur. Jean Michel Jarre, 38 ans comparaissait la semaine dernière pour une étonnante “fraude fiscale”. Il aurait tout simplement omis de faire la déclaration de ses revenus en 78, 79 et 81. En 80, il aurait en prime dissimulé une partie de ses ressources. Bigre ! Quand on vend par millions dans le monde entier un album comme Oxygène (performance quasiment sans égale pour un artiste français), quand on réunit plus de 200 000 personnes sur la Place de la Concorde pour l’exécution publique de ses oeuvres, et même des milliers de Chinois dans un stade pékinois, on en oublierait de faire état de ses ressources au percepteur ? Et on persisterait dans l’art improbable de se faire oublier de ce dernier, alors même qu’on a été l’objet d’un premier redressement de 14 690 000 F en avril 81, dont seule la moitié a été payée à ce jour ?

Pour ces petits comptes, les stars ont généralement recours à homme d’affaires. Celui de Jarre, Claude Pescetto, 46 ans, comparaissait aux côtés de son client, accusé de complicité frauduleuse. Il reconnaît bien avoir reçu 92 000 francs d’honoraires pour effectuer ce travail, mais pour sa défense il se borne à confier qu’il a été “dépassé par l’ampleur du travail à effectuer”. Une manière un peu sommaire d’évacuer ses responsabilités, qui n’a pas eu l’heur de plaire au procureur : “Je ne crois pas à la négligence due à une vie professionnelle agitée”. Et de requérir dans la foulée, huit mois de prison avec sursis pour le complice.

Toutefois, la modicité des amendes requises en prime (250 000 F pour Jarre, 50 000 F pour Pescetto), laisse supposer que l’affaire est plus complexe qu’il n’y paraît. Pour le moment, Jean Michel Jarre n’est pas encore privé d’oxygène, et Charlotte Rampling attendra le printemps (21 mars, date à laquelle le tribunal rendra son jugement), pour savoir si elle doit acheter des oranges…

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